La question du vinaigre et de sa consommation est certes délicate, c’est pour cela que nous apportons un bref aperçu des avis des quatres écoles sur la question, avec le rappel de quelques principes sur ce qui peut être la cause de la divergence entre les savants…L’Imâm Muslim rapporte dans son Sahîh que le Prophète (sallallahu ‘alayhi wa sallam) a dit :
« Quel bon aliment que le vinaigre ». L’Imâm an-Nawawî (rahimahullâh) dit dans son commentaire - que ce hadîth indique le bienfait du vinaigre, et que l’appellation
« al-Oudoum » dans le hadîth, indique l’importance de ce grand bienfait [1].
Il y a unanimité des jurisconsultes sur le fait que le vinaigre qui s’est modifié naturellement, c’est-à-dire sans intervention humaine, est licite. Qu’il ait été exposé au soleil directement ou sous son ombre, sans l’intention de le transformer pour le consommer - ceci est licite chez les Hanafites, les Chafiites et les Dhâhirites et toléré chez les Hanbalites. Selon les Malékites, l’avis est basé sur trois positions : la première qui le prohibe et l’interdit sur la base d’un hadîth rapporté par Mâlik, Ahmad, Muslim et an-Nassâ-î, la seconde le permet mais avec blâme, et la troisième mentionne la permission du vinaigre fait par autrui, mais sans intention de consommation du vin, car il n’est pas permis de transformer du vin au profit du vin. Les Chafiites et les Hanbalites ne permettent pas la transformation du vin afin d’en faire un remède [2]. Abû Hanîfa ainsi que ses compagnons disent qu’il n’y a pas de mal à transformer le vin. Al-Thawrî sur la question du vin, ne permet pas sa transformation pour la consommation. [3]
Les savants de
Lajnah ad-Dâ-îma disent que tout ce qui n’est plus appelé vin après sa transformation, n’est plus interdit à la consommation et que les jurisconsultes sont unanimes sur le fait que ce qui est interdit est ce qui est encore nommé vin [4]. Les savants de Lajnah disent encore que l’absorption d’une grande quantité en est interdite, car il est assimilable au vin. Mais si l’absorption de la grande quantité n’entraîne pas l’ivresse, rien n’en empêche l’achat, la vente et la consommation [5].
L’Imâm ach-Chanqîtî (rahimahullâh) dit dans son commentaire du Qor’ân, que Abû Dardâ (radhiallâhu ‘anhu) voyait la permission dans la transformation du vin, mais que beaucoup de savants interdisent sa transformation. Lorsque celui-ci se transforme de part lui-même, sans intervention humaine, il y a consensus [Idjmâ’] sur sa permission à la consommation.
Ach-Chanqîtî cite Ibn Hajar qui rapporte dans « al-Fath » que Abû Dardâ (radhiallâhu ‘anhu) ainsi qu’un groupe parmi eux, consommaient de la sauce de vinaigre fabriqué sur la base du vin. Et al-Bukhârî a mentionné ce hadîth au chapitre de la purification des aliments de mer [6].
Notes[1] Charh an-Nawawî ’ala Sahîh Muslim, 7/240
[2] Al-Fiqh al-islâmî wa Adillatuh, 4/2629-2631 et Kitâb « Souboul as-Sallam » de l’Imâm as-San’ânî, 1/153
[3] Kitâb « Moukhtasar Ikhtilâf al-‘Ulémâ » de l’Imâm Abû Bakr ar-Râzî, 4/359-362
[4] Fiqh an-Nawâzil, 4/270
[5] Fatâwa Al-Lajnah ad-Dâ-ima lil-Bouhouth al-‘Ilmiyyah wal-Iftâ, 13/52-53
[6] Kitâb « Oudhwâ ul-Bayân fî idhâh il-Qor’ân bil-Qor’ân » de ach-Chanqîtî